Jeunesse rurale au Maroc .. et à Timoulay : Réalité et perspectives

       
Jeunesse rurale au Maroc. 
         
         Aujourd’hui, les régions rurales Marocaines sont contraintes d’innover et de s‘adapter en permanence pour maintenir une bonne qualité de vie pour leurs habitants. Pour survivre dans un monde qui se transforme de plus en plus vite, ces régions ont besoin de l’énergie et des idées des jeunes. Les jeunes ruraux doivent donc avoir accès à toutes les chances dont ils ont besoin pour rester et pour vivre une bonne vie dans leur région d’origine. Ils doivent, en plus, pouvoir participer activement à la construction du monde rural de demain, en proposant des alternatives tant à l’échelle locale, qu’au niveau national. Il est donc d’une importance vitale de connaître et d’analyser les besoins, les problèmes socioéconomiques, les attentes et les priorités des jeunes ruraux.
1. Jeunesse rurale et éducation :
   Cinquante ans après l’indépendance, le Maroc n’arrive toujours pas à se doter d’un système d’enseignement efficace généralisé et équitable et le Maroc a choisi un choix plutôt politique que managérial. Malgré les réformes entreprises par les gouvernements qui se sont succédés au pouvoir, le système éducatif n’a pas encore atteint une émancipation suffisante et la politique poursuivie en matière d’enseignement est devenu un fiasco total. Cependant l’analyse de la situation éducative actuelle et des liens entre éducation et pauvreté montre que les indicateurs du système éducatif marocain sont parmi les moins performants du monde. Près de 43% de la population âgée de plus de 10 ans, soit plus de 9 millions de personnes est analphabète.
Le taux de scolarisation des enfants âgés de 6 à 11 ans est passé de 84,6% à 92,2% en 2003-2004 au niveau global et respectivement de 76,7% à 87,8% en milieu rural. Le taux de redoublement au niveau des collèges est de 16,5%, celui de l’abandon atteint 13,6%. La couverture des communes rurales est insuffisante (46%) et l’encombrement des classes est également élevé (30% des classes ont 41 élèves et plus). Pour faire face à ces défis, le Maroc a dévoilé un projet de réforme de l’enseignement sous forme d’un plan d’urgence pour l’accélération de la mise en œuvre de la réforme de l’éducation et de la formation 2009-2011, la concrétisation de ce plan nécessitera la bagatelle de 19,5 MMDH à ajouter aux budgets annuels accordés au secteur qu’ a reçu 37 milliards de dirhams en 2008 dont 12% seulement vont à l’investissement. Devant l’incapacité de surmonter les problèmes auxquels sont confrontés, les jeunes issues du monde rural analphabètes ou peu instruits sont fort désavantagés sur le marché d’emploi plusieurs d’entre eux peuvent avoir travaillé durant l’enfance.*
(*d’après les statistiques du haut commissariat au plan)
2- Le faible niveau de formation et d’information des jeunes ruraux :
On ne peut exercer ou réaliser un droit que lorsqu’on n’en a connaissance. En milieu rural, les jeunes n’ont pas de culture foncière et ne sont pas formés à la gestion des ressources naturelles (production agricole, gestion de périmètres, fertilité des sols, gestion financière des fonds et du partenariat.) De plus, ils connaissent mal leurs droits (vie familiale, éducation et formation à un métier, protection sanitaire, amour, équipement professionnel etc.) et leurs devoirs (respect des parents, contribution à la promotion économique de la cellule familiale, alléger les parents de certaines tâches quotidiennes, assister les parents affaiblis par l’âge ou la maladie, préserver l’esprit de partage etc.)
3- La jeunesse rurale et La dégradation des ressources naturelles :
    Les importantes ressources foncières qui constituent la base de la production sont, à l’heure actuelle, fortement menacées par la progression de la dégradation et du processus de la désertification qui se marque à des degrés divers à travers plusieurs régions du pays. Cette forte dégradation résulte d’un ensemble complexe de facteurs climatiques (sécheresses récurrentes, forte irrégularité spatio-temporelle des pluies utiles) et de facteurs anthropiques à mettre en liaison avec l’augmentation des besoins des populations défrichements agricoles, émondage, surpâturage, persistance de systèmes de production extensifs non adaptés aux conditions du milieu. Tous ces facteurs contribuent à rendre les ressources peu disponibles et du coup à rendre difficile l’accès des jeunes au foncier.
4- La question de la promotion des loisirs dans le monde rural :
Les conditions de vie en milieu rural s’avèrent être un facteur limitant pour les jeunes (surtout diplômés) candidats à la réinsertion. En effet, il n’existe généralement pas d’infrastructures de loisirs : cinéma, terrain de jeu, bibliothèques, vidéoclubs, théâtres, centres culturels, cyber café etc. Le jeune qui s’installe en campagne est vite confronté au problème de répartition de son temps entre le travail généralement non rémunéré, le loisir et le repos. La famille de jeune couple qui ne sait pas quoi offrir à ses enfants en termes de distraction à la campagne développe rapidement un sentiment de frustration, sinon de culpabilité. Beaucoup de ruraux vont en fait en exode pour tout juste découvrir la ville ; malheureusement l’attrait devient rapidement si fort que très peu songent à retourner à la campagne. Ils restent en ville grossir le lot des chômeurs, ou dans le meilleur des cas, pour venir dans l’informel. L’aspect « loisir » est donc quelque chose à prendre en compte dans les programmes de développement rural.
5- Perspectives d’avenir :
    L’échec des « stratégies » mises en place par le ministère chargé de la jeunesse et le manque d’opportunités intéressantes pour l’insertion des jeunes ruraux dans le processus de développement explique fondamentalement la nécessité de mener une réflexion approfondie sur les questions liée à cette jeunesse. La production d’outils visant à faciliter le traitement systématique des questions propres à la jeunesse dans le cadre d’une politique publique est une responsabilité partagée et nécessite l’intervention de plusieurs acteurs étatiques ou non. La mise en œuvre de cette politique exige une meilleure implication des jeunes ruraux eux même car ils constituent l’essentiel de ses bénéficiaires et les forces vives chargées de la mettre en œuvre. Cette politique publique doit leur permettre de participer aux structures de prise de décision et de programmation, d’amener les anciens à faire plus confiance aux jeunes et à les écouter, et eux même de s’organiser pour se faire entendre et créer des conditions pour l’amélioration de leur formation. Il n’y aura pas de véritable développement agricole sans une prise en compte conséquente de la jeunesse rurale dans les politiques et programmes orientés sur le secteur rural. L’implication progressive de la jeunesse rurale dans ce processus exige de celle ci un bon niveau d’éducation et de formation susceptibles de lui permettre de faire face aux nombreux et souvent complexes défis du développement dont certaines caractéristiques ont trait à :

  - L’importance de la croissance démographique et des courants migratoires,
  - Le sous emploi durant les 8 mois de l’année, et qui favorise particulièrement l’exode rural,
  - Le très bas niveau de scolarisation surtout des jeunes filles dans les zones rurales,
  - La faiblesse des moyens budgétaires liée à la fragilité de l’économie Nationale,
  - La défaillance de l’autorité parentale et la démotivation des parents à la scolarisation de leurs enfants,
      L’insertion sociale de la jeunesse rurale dans son milieu d’origine est une condition essentielle pour le développement du Pays à moyen et long termes. Par ailleurs il est important de signaler que l’approche principale au problème devra être le renforcement des capacités d’intervention des femmes et des jeunes ruraux à travers la formation et l’alphabétisation. Il ressort de l’examen du cadre institutionnel de promotion de la politique nationale de l’emploi que les institutions spécialisées sont peu tournées vers la promotion de l’emploi rural en général et en particulier de celui des jeunes ruraux. Aussi les éléments de la politique nationale de l’emploi tant en ce qui concerne la promotion des emplois directs que les emplois indirects, n’ont pas souvent pris en compte les préoccupations des populations rurales en général et des jeunes ruraux en particulier. Les jeunes ruraux en tant que groupe cible n’ont pas fait l’objet d’une attention spécifique. Conscient des défis auxquels les jeunes ruraux sont et seront confrontés, tout projet de société reste incomplet, fragile, peu satisfaisante tant qu’ils ne sont pas intégrés dans les sociétés, tant que les décideurs ne prennent pas en considération leurs besoins dans l’élaboration des politiques publiques car la société humaine n’évolue jamais de manière linéaire et c’est grâce aux contributions des uns et des autres elle peut y avoir progrès. Notre société est en pleine transformation, elle est en transition démocratique cela implique des débats sur des thèmes comme la position de la femme dans la société, la place de la religion, le rapport à l’histoire et à l’héritage culturel, la démocratie, la place des jeunes, les institutions etc.
Situation des jeunes à Timoulay :
   Au village de Timoulay, la situation n’est guère différente de celle décrite en haut et qu’on peut résumer comme suit :
     En effet, ni la commune rurale, ni les autorités concernées par la jeunesse n’ont jamais mis au point des programmes au profit de l’enfance et jeunesse locale, ou même de petits projets susceptibles de palier à des difficultés et problèmes dont souffre cette jeunesse à savoir :
-          Absence d’espaces-ressources susceptibles d’aider les élèves dans leur scolarité.
-          Absence de maison des jeunes.
-          Absence du club féminin.
-          Absence de terrains de jeux.
-          Absence de tout encadrement des jeunes paysans
      Ces difficultés qui engendrent de la frustration, de perte de repères chez les jeunes (surtout ceux qui sont issus des familles pauvres et qui sont majoritaire dans notre oasis) et les poussent à délaisser leurs études et à quitter l’école et le collège sans finir leur scolarité, à avoir des comportements violents et immoraux, de s’adonner au tabac et à la drogue et surtout à chercher à quitter le village et l’oasis et immigrer vers les villes les plus proches ou même à chercher à quitter le pays vers l’Europe.
Attitudes qui se sont réfléchies sur l’environnement de l’oasis de Timoulay : palmeraie et champs délaissés, non respect des cultures et des jardins, pollution de l’eau et accumulation des déchets dans différents points de la palmeraie, vols et saccage de certaines récoltes (oliviers, dattiers, amandiers…).
     Cette situation est beaucoup plus mal vécue par nos adolescents qui sont, comme l’a stipulé le célèbre sociologue Edgar Morin, « le maillon faible de la société : ils sortent du cocon de l’enfance, ils aspirent à la pleine existence, ils ne sont pas encore intégrés dans le monde du travail, et en eux fermentent aspirations, révoltes et angoisses… » (in : Edgar Morin : « Pour une politique de civilisation ». Ed : arléa)